Exposition JAMES GUITET (1925-2010)

JAMES GUITET

Créateur protéiforme L’œuvre de James Guitet (1925-2010) se répartit dans divers domaines de la création : peintre et dessinateur, créateur de cartons de tapisseries, graveur, illustrateur, il fut aussi un enseignant du dessin Angers d’abord, puis Versailles et enfin la Sorbonne. Son enseignement devait, assurément, révéler des trésors de sensibilité, de culture et de finesse d’esprit.

Sans avoir été stricto sensu un théoricien pur et dur, il a su transcrire nombre de ses pensées et réflexions, tant sur sa propre création que sur l’art de son temps et l’architecture. Son Lexique surprend par l’extrême acuité de ses commentaires, ainsi que son humour quelque peu grinçant et d’une belle lucidité. Tout comme le sont aussi ses divers entretiens publiés. Et particulièrement ceux réalisés avec son si fidèle ami Michel Ragon, qui fut et reste incontestablement son meilleur analyste pictural.

Considéré dans son entier, l’œuvre est parfaitement cohérent au fil de ses diverses périodes créatrices. Evoluant de l’abstraction lyrique (dès 1947 !) l’abstraction analytique. De fait, jusqu’en 1956, sortant d’influences fort diverses, il évolue dans le courant du lyrisme, de l’abstraction chaude. Ami d’Atlan, il compose des œuvres très structurées en petits plans colorés. Puis, la géométrie s’installe plus largement dans l’espace peint. Alors que de nouvelles explorations esthétiques poussent James Guitet se diriger dans une nouvelle voie picturale : les pigments, toujours utilisés, voient arriver la caséine qui donne un autre effet de matière. Puis, plus tard, il ajoute d’autres éléments qui donnent une allure plus sensuelle encore la matière travaillée. Quelques tableaux noirs, des toiles blanches beaucoup plus nombreuses naissent, sensibles l’extrême. Des formes simples s’imposent, affirmées, superposées ou juxtaposées. Ses textures particulières donnent une dimension autre des formes plus ouvertes, traitées dans un chromatisme intuitif et délicat. Commentateur attentif, Michel Ragon définit ses œuvres nouvelles comme étant désormais du naturalisme abstrait et non plus du paysagisme abstrait.

L’exposition ici présentée s’arrête judicieusement la fin des années 1960, restant ainsi dans le cadre strict de l’abstraction « historique ». L’œuvre de Guitet, après, se développera dans d’autres directions. La toile devient objet-tableau en 1978. D’autres chemins s’ouvriront ensuite au peintre, plus éloignés des œuvres ici montrées ; lesquelles oscillent avec constance entre l’architecture des éléments et le jeu de la matière. James Guitet fut indéniablement un des artistes les plus appréciés de sa génération. Il a toujours été un peintre strict, silencieux, ouvert la matière, amoureux de la lumière et mêlant, depuis toujours dans une étroite communion, sensualité et spiritualité.

Patrick-Gilles Persin