
Lahcen Zahra
Les Marocains
Les Marocains
L’individualisme occidental est souvent considéré comme une réalité homogène et unique: celle d’un être rationnel que les Lumières auraient imposée. Cette définition exclut les non-occidentaux d’un accès à l’individualité.
L’individu n’existe pas que dans les pays occidentaux.
L’Occident a inventé une histoire qu’il a réussi à imposer à tous comme vraie: c’est seulement là que les «individus» existent. «L’Occident où triomphe l’individu, et puis l’Orient, le sud, avec leurs multitudes indifférenciées».
A un certain moment de sa retraite, mon père s'est décidé à quitter la région parisienne pour retourner vivre dans sa ville natale au Maroc. Devenue une destination touristique à la mode, la ville a connu un essor économique et démographique important. Le quartier, appelé Quartier Populaire, où mon père s'est installé, en périphérique de la médina s'est au fil des 30 dernières années considérablement étendu et accueille régulièrement de nouveaux habitants venus travailler.
Les maisons de ce quartier sont très semblables architecturalement. Construites autour d'un patio, elles s'élevent sur un voir plusieurs niveaux en fonction de la composition et des revenus de la famille. Un toit terrasse appelé star est commun à toutes ses maisons.
En arpentant ce quartier, je remarquais que les habitations assez identiques de l'extérieur, se démarquaient les unes des autres, par leurs portes d'entrées que les occupants avaient customisées à partir de faïences, de peintures, de plantes, de motifs géométriques et parfois de calligraphies.
Cet ornement esthétique, graphique, plastique manifestait à mon sens, à la fois une volonté d'afficher une individualité en se démarquant de leur voisinage alors que jusque là, spontanément, je pensais que la société marocaine, tout comme les sociétés collectivistes, prônait la prééminence du groupe sur l'individu et étouffait l'individualité.
Mais était-ce vraiment le cas ? Y avais-je un instant réfléchi? Ou bien avais-je été conditionné à le croire ?
Ce que je constatais pour les portes d'entrée de ces maisons, l'étaient tout autant des djellabas aux motifs aussi divers que colorés, des tatouages sur les visages des femmes, ancestraux et mystiques, bien avant que l'occident marchand, avec un appétit d'ogre, ne s'en recouvre de la tête aux pieds dans un mouvement aussi gargantuesque que fulgurant tel un tsunami qui emporte tout sur son passage, avale et uniformise chaque être alors même que chacun se lancera dans une course schizophréne à l'originalité narcissique et un mimétisme de masse.
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